Lecture d'expert - Aéro Montréal, culture partenariale et grappes industrielles

Article published on
October 14, 2021

À Umalia nous aimons vous parler de partenariats et d’impact sociétal, vous l’avez sans doute remarqué. Deux sujets complexes, qui représentent un vrai défi lorsqu’il s’agit de les concilier avec la réalité quotidienne de nos organisations et pourtant…il s’agit là de deux sujets majeurs que les entreprises ne peuvent pas ignorer.

S’il y a un endroit où la culture partenariale doit être présente, c’est bien dans l’ADN des grappes industrielles. Collaborer et s’engager pour la cause commune, c’est la base de leur raison d’être. Nous avons commencé cette réflexion il y a quelque temps avec Cargo M, la grappe montréalaise du transport et de la logistique. Nous avons eu récemment la chance d’échanger également avec une des grappes industrielles les plus actives et innovantes non seulement à Montréal mais aussi à l’international : Aéro Montréal, grappe industrielle du secteur aérospatial. Et plus particulièrement avec Charlotte Laramée, Vice-Présidente, Opérations.

La mission des grappes industrielles résonne beaucoup dans nos réflexions car elles permettent, de par leur nature et mission, des changements systémiques. Nous avons la conviction que c’est en multipliant les approches systémiques et multisectorielles que nous pourrons répondre aux problématiques et enjeux sociétaux. Ce type de regroupements est aligné avec l’objectif n°17 desObjectifs du Développement Durable de l’ONU sur les partenariats pour la réalisation des objectifs, qui repose sur le postulat que « Des partenariats inclusifs construits sur des principes et des valeurs, une vision commune et des objectifs communs sont nécessaires. »  

Ecoutez le témoignage de Charlotte Laramée avant de découvrir notre réflexion sur le sujet !

 

UNE GRAPPE INDUSTRIELLE ? POUR QUOI FAIRE ?

« La grappe existe grâce à ses membres, à la volonté de ceux-ci de se rassembler » 

Comme le souligne Charlotte Laramée, Vice-Présidente Opérations, les grappes industrielles existent parce que les acteurs d’un secteur ont choisi de travailler ensemble pour mieux répondre aux problématiques communes à leur secteur en particulier. Cette approche est particulièrement puissante car c’est un véritable levier systémique pour aborder et relever les défis et demeurer pertinent. 

Ce rassemblement permet également d’avoir une voix unique qui représente l’intégralité d’une industrie sur un territoire donné, ce qui facilite considérablement la communication avec les différents niveaux de gouvernement, le réseau académique, la société civile, les autres industries et même d’autres grappes à l’international. Au sein de l’industrie même, la grappe permet la libération et la circulation de l’information pour renforcer les liens, provoquer les opportunités et multiplier les connexions. Cela favorise grandement l’innovation technique, grâce à la création de partenariats, de partage d’expertise, de réseau, etc. Mais nous remarquons que de plus en plus, l’innovation sociale en bénéficie également, si on pense, par exemple à des initiatives avant-gardistes comme le partage de la main-d’œuvre.

En plus d’adresser les enjeux actuels, ces associations permettent également de mieux préparer le secteur pour les défis et opportunités de l’avenir et de traiter ensemble les sujets transversaux.

  

PERTINENCE ET SENS

« On cherche toujours à aligner la vision de la grappe avec les besoins concrets des entreprises. »
« Les gens osent dire les vrais enjeux et les bonnes décisions se prennent car on est dans une perspective d’être constructifs »

Même si la grappe est née d’une impulsion commune de la part de ses membres qui souhaitaient se rassembler et travailler ensemble, la pertinence de ce rassemblement et le sens de ses activités doivent être continus et sentis pour garder la mobilisation initiale. Comment s’assurer de la pertinence dans le temps ?

À en croire Charlotte Laramée, l’un des ingrédients clés pour maintenir la pertinence de la grappe serait l’écoute. La capacité d’écoute de la grappe envers les besoins des entreprises en temps réel lui permet d’être pertinente dans les informations qu’elle donne aux différents niveaux des gouvernements sur les problématiques et enjeux de l’industrie. Parallèlement, la qualité d’écoute auprès des gouvernements par rapport à leurs intentions et projections permet à la grappe d’orienter les entreprises sur les tendances réglementaires, politiques et économiques. Dans le cas d’Aéro Montréal, cette qualité d’intermédiaire est saluée et reconnue et lui permet de piloter des programmes gouvernementaux en gestion directe afin d’en assurer le déploiement dans l’industrie.

La pertinence des activités d’une grappe comme Aéro Montréal doit se faire sentir auprès des membres dans ses activités quotidiennes, en rendant chaque rencontre constructive pour les membres et pour l’industrie in fine.

Dans ce genre de partenariat multipartite, il est nécessaire d’avoir une valeur ajoutée visible tant pour les employés de la grappe que pour les membres afin que tous trouvent du sens à leur engagement. La valeur ajoutée de la grappe et sa pertinence passent par la capacité de ses membres à être dans une posture constructive. Le défi pour Aéro Montréal est alors de créer et maintenir un cadre de discussion et de travail dans lequel les participants mettent les intérêts personnels de côté au bénéfice de l’ensemble de la grappe.

Enfin, quand on parle de pertinence, un dernier élément clé à noter réside dans la gouvernance même de la grappe.

GOUVERNANCE COLLABORATIVE

 « La clé c’est d’avoir plusieurs façons de faire, plusieurs approches, et de toujours être concrets. »

Un élément fort dans la garantie de cette pertinence tant recherchée sont les mécanismes de gouvernance mis en place. Qu’est-ce qui pourrait mieux garantir la pertinence de la grappe qu’une gouvernance partagée à tous les niveaux avec des personnes de l’industrie ?

Cette gouvernance en binôme est une pratique très intéressante à observer chez Aéro Montréal. En effet, les axes et piliers stratégiques bénéficient ainsi d’un double regard qui, enrichi par la présence d’un membre de l’industrie, trouve un meilleur ancrage dans la réalité et les questionnements des entreprises du secteur. 

Cela permet également de poser une action forte, visible, qui assoit la crédibilité de la grappe et de ses actions et apporte les bénéfices de transparence, partage rapide d’information, efficacité et mobilisation des membres. Ce lien fort et direct avec ses membres permet à la grappe de rester agile étant au contact de l’information et des acteurs sur une base suivie et régulière.

 

LES CLÉS DU PARTENARIAT

« Quand on voit la crise qu’on traverse, on sait que c’est en travaillant ensemble que les entreprises vont pouvoir s’en sortir. » 

Nous remarquons actuellement que les raisons pour monter des partenariats sont multiples. Qu’il s’agisse de la reprise d’une entreprise familiale, de mutualisation, de recherche de complémentarité pour demeurer pertinent ou de consolidation pour répondre à une industrie en transformation, nous retrouvons ces tendances dans le secteur aérospatial.

Les raisons pour monter un partenariat sont en effet multiples mais pour des partenariats heureux et fructueux, quelques éléments de base sont requis. Nous l’avons déjà vu ici, la volonté de travailler ensemble, lorsqu’elle est une émanation de la mission et de la vision des organisations - en d’autres termes, lorsqu’elle est authentique - est un élément essentiel.

Mais vouloir travailler ensemble ne suffit pas. Encore faut-il que cette association soit en vue de répondre à un besoin réel sur lequel des objectifs de réussite puissent être posés dans une vision partagée par les partenaires potentiels.   

Il nous manque alors l’opportunité ! Le bon sujet. Celui qui permettra à chaque partie d’apporter quelque chose sur la table et qui permettra aux partenaires d’être complémentaires. Travailler en partenariat est plus complexe que travailler seul, alors si vous avez les compétences sur un sujet en particulier et que vous n’avez pas besoin de compétences complémentaires : allez-y…seul.

Dans notre discussion avec Charlotte Laramée, il est clair qu’un sujet en particulier ressort comme étant LE sujet rassembleur. L’enjeu environnemental.

DU VERT POUR LA RELANCE

« Nécessité de prendre un virage vert parce que c’est évident que c’est la clé de la relance, clé de la croissance, de l’innovation et de l’attraction de talents »

Comme nous le rappellent régulièrement les scientifiques et de nombreux mouvements citoyens, il est urgent pour les entreprises de toutes les industries d’agir en matière d’environnement et de collaborer pour que les différents secteurs deviennent des vases communicants sur ce sujet, notamment pour développer l’innovation. Avec de nouvelles générations de plus en plus conscientisées sur l’impact environnemental des entreprises et de certains secteurs en particulier, c’est un engagement qui sera de plus en plus recherché par les nouveaux talents. 

Parmi les apports de la grappe face à la problématique environnementale, nous notons, entre autres, la capacité de créer des espaces de réflexion sur ce sujet, notamment pour les plus petites entreprises du secteur. Dans le quotidien de ces PME, il n’y a pas toujours la place et les moyens pour aborder et agir sur ces enjeux. La mutualisation des efforts est clé si l’on souhaite un changement systémique et cela commence par un espace de dialogue, de sensibilisation et de réflexion commune.

L’environnement était un sujet déjà porteur avant la pandémie pour la grappe industrielle qui venait de créer un axe de travail sur ce sujet. Face à l’urgence de la crise, Aéro Montréal a dû faire preuve d’agilité et ajuster ses priorités mais a quand même réussi à maintenir cette réflexion, en parallèle de celle sur la relance. Elle a notamment su remobiliser des ressources pour penser le verdissement de l’industrie dans la relance post-covid et joindre ainsi ces deux sujets.

Nous sommes parfaitement alignés avec la vision que propose Aéro Montréal de l’environnement comme sujet rassembleur. Comme le souligne Charlotte Laramée : « L’environnement c’est enfin le sujet qui permet d’arrimer toutes les énergies autour d’un objectif commun ».

En effet, de toutes les problématiques sociétales, il s’agit sans doute ici de la plus transversale, elle ne connait ni limites territoriales, ni gouvernementales, ni sectorielles. Les effets du changement climatique vont toucher tout le monde, du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest. Cet enjeu environnemental a des répercussions systémiques (comme la justice climatique, l’équité, l’éducation…) et nécessite la collaboration de tous pour des réponses elles-mêmes systémiques. Elles devront bien sûr être adaptées au contexte mais elles devront venir de tous les secteurs et chaque acteur devra poser des actions concrètes dans une vision commune.  

 

ET ENTRE LES GRAPPES ?

« Ça doit passer par la collaboration avec d’autres grappes et d’autres secteurs. »
« La collaboration multisectorielle est essentielle » 

Ces changements systémiques et l’innovation technologique tant recherchée ne pourront véritablement voir le jour que si les cloisons tombent et que des terrains de collaboration naissent non seulement au sein d’industries mais également entre les industries. Comme le mentionne Charlotte Laramée, la grappe aérospatiale n’opère pas en isolement. Ces connexions avec d’autres secteurs devront se multiplier et se diversifier pour que les innovations, les ressources de chaque secteur puissent s’aligner au service d’une vision commune.

Les actions, les projets et les partenariats que les différents secteurs arriveront à arrimer entre eux seront certainement le levier le plus puissant pour changer le cours des choses et éviter les scénarios sur lesquels nous mettent en garde aujourd’hui les scientifiques.  

 

Nous avons abordé, grâce au témoignage d’Aéro Montréal, quelques clés de partenariats réussis, que ce soit dans les ingrédients nécessaires, dans les pratiques de gouvernance ou dans les raisons qui amènent à la création de partenariat. Nous terminerons donc cette réflexion avec une invitation à réfléchir aux partenariats comme clés de problématiques sociétales porteuses de sens pour l’individu, les organisations et la société. N’hésitez pas à partager avec nous vos idées sur le sujet via nos réseaux sociaux !